mardi 30 novembre 2010

Les Invincibles

Saison 1


Si pour beaucoup les séries françaises rappellent des productions plus ou moins obscures, telles que Maguy, Premiers baisers, voire Marc et Sophie, ces dernières années, l'évolution tant attendue semble enclenchée. En effet, les succès d'estime de programmes - comme Braquo, Pigalle la nuit ou encore Engrenages - démontrent qu'en France, il n'est pas uniquement question de Mouss Diouf, d'un mistral bien trop euphorique ou d'un ange gardien nain, certes magique, mais fort niais.

Mon parcours télévisuel avec les séries bien de chez nous s'est, à quelques exceptions près, arrêtée avec le fin du Club Dorothée. Lors de nuits bien trop blanches, j'ai cela dit pris plaisir à suivre les rediffusions d'Hélène, Johanna, Cri-Cri et compagnie, mais arrivé un moment, il faut se ressaisir. Les Invincibles produite pour la chaîne ARTE ne déroge pas à cette bonne nouvelle règle. Elle sait conjuguer efficacité, originalité et surtout qualité. Elle met en scène quatre comédiens de talent interprétant des rôles intelligemment écrits : FX (Benjamin Bellecour), Vince (Cédric Ben Abdallah), Hassan (Jonathan Cohen) et Mano (Jean-Michel Portal). Agrémentant ce casting de choix, peut-être pour vendre davantage la série, deux têtes connues du grand public y sont ajoutées : Gisèle (Clémentine Célarié), toute nouvelle belle-mère d'FX et Zoé (Lou Doillon), future ex de Mano.

L'histoire : Emmené par FX, le quatuor proclame le changement. Trentenaires, fuyant les engagements et la routine, une charte symbolique est alors établie. Composée de règles parfois drastiques, parfois légères, relevant souvent du défi, elle dirige en tous les cas le quotidien de nos héros. Symbole d'appartenance ultime : chacun d'entre eux se voit affublé d'une énorme montre bleue. Mises au poignet, elles cèlent le pacte et donnent un point de départ à leurs objectifs communs. Si l'on exclut les mini paris, souvent blagues, la priorité pour chacun des personnages est l'indépendance. La décision est donc prise : au cours du premier épisode, qu'elles soient longues ou courtes, sympathiques ou au contraire étouffantes, quand la montre retentit, les relations sont stoppées net et les filles qui partagent leurs vies – sans explication aucune - se retrouvent larguées.

Deux éléments atypiques sont ajoutés à la construction des épisodes. D'une part, comme dans Fais pas ci, fais pas ça ou encore dans la très bonne Modern family, les protagonistes s'adressent à une caméra et se confient à un journaliste. Si les mini-interviews – en groupe ou en solo – ponctuent chaque épisode, à aucun moment il n'est question d'une équipe de télévision qui les suivrait au cours de leurs journées. Certes sans incidence sur le scénario, nous sommes amenés à nous poser les questions de la provenance de ce reportage, de son organisation et de son but. Aucune réponse ne nous sera apportée. D'autre part, au travers d'Hassan, fan de B.D. et autres mangas, la série joue d'originalité dès son générique puisque nos quatre héros deviennent super héros animés. En parallèle de leurs vies, ces séquences illustrent métaphoriquement leurs déboires en les confrontant à de terribles monstres. Si cet élément et comme annoncé original, il est, il faut l'avouer, en ce qui me concerne, plutôt inutile. En effet, jamais drôle, jamais intéressant et n'apportant aucune information supplémentaire, nous pouvons nous réjouir de leur nombre peu important. Il est à supposer que les fans de comics s'y retrouveront davantage.

Pour ce qui est des personnages en eux-mêmes, FX, chef de bande, étudiant en psychologie, chef scout à ses heures, vivant dans la maison familiale auprès de son père Alain (François Dunoyer) fréquentant depuis peu la libérée Gisèle. Libérée – euphémisme – étant donné que très vite, cette dernière s'envoie FX. S'ensuivent des rapports familiaux houleux, la révélation malheureuse de la trahison, l'éclatement du trio, les retrouvailles manquées, les tentatives de pardon et finalement la recomposition du couple et de la relation filiale. Etant un des fils rouges de cette première saison, FX a droit a une seconde histoire importante puisqu'il quitte Meïke (Brigitte Bémol) qui, peut-être par vengeance, aura une aventure avec Mano. Benjamin Belcourt campe ce personnage adulescent, déterminé, fédérateur, un peu naïf et attachant avec une grande justesse.

Mano, artiste de la bande est chanteur lead d'un groupe de rock, ce qui lui donne accès à de nombreuses aventures auprès de ses groupies. Il est également employé d'une boutique de musique. L'esprit de tribu clairement ancré, il s'apprête en début de saison à larguer Zoé. L'herbe coupée sous le pied, la jeune fille prend les devants et le quitte. Sentimental ou manipulateur, il est alors difficile à cerner. Essayant dans le dos de ses potes – car contraire au règlement – de la récupérer, celle-ci finira par y concéder. Dans une scène mémorable, après coucheries, elle est de retour, camion de déménagement blindé devant la porte de l'immeuble, prête à emménager, Mano tient alors sa revanche et lui lance un « Je te quitte ». L'ayant ridiculisée, il peut se consacrer à son nouveau coup de cœur qui n'est autre que Meïke. Le statut d'ex-copine de l'un de ses meilleurs amis conduira le groupe dans une crise existentielle. Pardonner ? Concéder ? Accepter ? Eliminer ? Ces différentes options n'auront guère le temps d'être envisagées puisque Meïke le quittera. En fin de saison, une seconde histoire plutôt bancale lui tombe dessus : son père serait David Bowie. Jean-Michel Portal, juste, sympathique et rigolo demeure malgré tout le personnage scénaristiquement en dessous des trois autres.

Vince, autre très bon personnage de la série, annonce la couleur dès sa première scène importante. En effet, sa petite amie en deuil depuis deux minutes ne provoque en rien son indulgence parce qu'à cet instant précis, la montre retentit et alors que les condoléances se distribuent, Vince, lui, quitte sa femme, pourtant déjà en pleurs. Scène d'humour noir délicieuse ! Suite à cela, Vince peut laisser libre cours à sa dualité. Présentant bien en société, sympathique, aimable, quand vient la nuit, il laisse s'échapper ses différentes envies et pulsions sexuelles : engageant des prostituées, baisant à trois, participant à des soirées échangistes très drôles. Il tentera l'expérience de l'homosexualité avec Marc (Lannick Gautry, dont j'avais fait la connaissance dans la très bonne comédie « Nos jours heureux »). En fin de saison, après de multiples relations, Vince, peut-être encore attaché à son ex, ne trouve pas sa voie. Cédric Ben Abdallah déploie ses multiples facettes avec naturel et humour.

Enfin, Hassan deviendra peu à peu le personnage le plus important de la série. Son histoire d'amour tumultueuse avec Cathy (Marie-Eve Perron) se développera tout au long de la saison et en sera le final ! Dès la mise en marge du plan de départ, Hassan peine à s'affirmer. Il est en effet incapable d'avoir le dessus sur sa femme détentrice du pouvoir absolu au sein de leur foyer. Cathy crie, hurle, dirige, impose, dicte et ne laisse aucune place à Hassan pour quelque décision que ce soit. Après la tentative vaine de séparation, celle-ci empêche Hassan de voir sa bande de potes, qui selon elle, le manipule et l'influence. Les différentes faiblesses de caractère d'Hassan se transforment en réels problèmes psychlogiques puisque celui-ci en vient à mener une double vie permanente. D'un côté, il fait croire à FX, Vince et Mano qu'il est célibataire, qu'il a des aventures, loue même un appartement; organise un faux déménagement. Et de l'autre côté, il prépare son maraige avec une femme qui le domine et l'épuise. Ses seuls moments de quiétude proviennent des somnifères qui endorment l'excitée. Parallèlement, il couche avec la psy qui lui est imposée au travail. Celle-ci finira par lui annoncer la naissance prochaine de leur enfant. Hassan s'adapte et s'invente donc une troisième personnalité. Jonathan Cohen incarne ce mec paumé pour qui il est impossible de dire « non » ou de prendre la moindre initiative à la perfection. Le rôle extravagant, extraverti, dynamique, impulsif et parfois tendre de sa femme, agrémenté par les interventions comiques de sa famille tout aussi barjo, en font un regroupement d'acteurs doués et drôles, apportant chacun leur très bonne touche.

Mauvais point : le dernier épisode est clairement en dessous du niveau général de la série. Le mariage est trop long. On attendait la bombe d'Hassan, le résultat n'est pas à la hauteur de l'excitation qui montait, certes il quitte Cathy mais la grande scène de révélations n'arrive jamais, dommage. Ce qu'on peut en tirer c'est que, même s'ils ont avancé, aucun des 4 n'a trouvé son chemin. S'ils ont appris des choses, il reste de la matière pour des saisons supplémentaires, d'autant plus que les quatres amis n'en sont plus...

En conclusion, cet excellent casting, cette histoire aboutie et surtout la cohésion des quatre acteurs principaux interagissant presque naturellement entre eux en font une série qui met réellement de bonne humeur et vous fait passer d'agréables moments. Découvrez-la rapidement car la saison deux débarquera sur nos écrans, début 2011. Vivement !


16/20

2 commentaires:

Cindy a dit…

Je pense exactement la même chose de cette série. Rien à dire de plus, c'est assez complet !
J'ai adoré, je me suis attachée aux personnages, je veux voir la suite !
Très bonne série française !

Popa a dit…

Super série, super résumé. Je vais suivre la saison 2 "à la semaine" sur Arte.
Les seconds rôles sont aussi doués que les premiers, j'ai adoré quand le père de Cathy dit à Hassan de se barrer, qu'il lui fait non de la tête au mariage, etc.
On est d'accord, Mano est le moins intéressant des 4.
Je souligne aussi la relative inutilité des séquences BD, ça n'apporte rien, il n'en faudrait pas plus.